samedi 10 janvier 2015

Off du Val Joly

Après les multiples repérages, place à la présentation du parcours aux conviés du jour. Le peloton s'est restreint à cause de quelques rafales de vent nocturnes. Il ne reste que les plus valeureux, l'élite franco belge de la discipline, des guerriers , que le sang coulant à flot n'émeut guère. 



La sortie n'a pas encore commencé mais je vois déjà dans leurs yeux de la rage et une motivation froide qui s'échappe par l'ensemble des pores de leur peau. Pour m'assurer de leur indéfectible loyauté, j'avais aussi invité Yves dit "le serre file". Le bougre culmine à pratiquement 2 m et son air menaçant inquiètera énormément mes camarades pourtant habitués à côtoyer des durs à cuire.Avec lui aux trousses, pas de risques que nous traînions.



 Stan ,effrayé, s'oublie dans sa magnifique tenue du jour .


Faut avouer que le Stan représente un peu ce qu'est Looping à l'agence tous risques, un doux dingue, le seul gars qui a les cheveux qui lui poussent à l'intérieur de la tête. Avant, nous l'appelions le chamois mais ça ... c'était avant. Sans faire offense à l'homme, le chamois lui , il réfléchit. Stan, par contre, lorsqu'il voit une descente, il laisse son cerveau à la maison et laisse faire la gravité. Les pilotes prennent 4 G, Free est passé au 5 G, Stany , si les conditions sont optimales (1 m de ronces, 100 l de boue et un précipice latéral ) dépasse allègrement les 10 G.



Après cette succincte présentation des deux premiers athlètes du jour, j'ai bien senti qu'éliminer progressivement mes camarades allait être beaucoup plus difficile qu'escompter. J'ai pourtant tout essayé :
- des murs de ronces , Mais Michael dit "terminator" , 80 kgs de muscles, mois de juillet du calendrier des dieux du stade, a bravement lâché "i'll be back" avant de prendre les devants et de tracer une sente au milieu des fourrés. Les genoux en sang, les larmes ruisselantes sous ses lunettes noires, une patte de chevreuil arrachée au passage entre ses dents, il s'est sacrifié pour le bien de l'équipe.Tant de dévotion à la cause procure des émotions extraordinaires ...



- vu que la flore n'a pas donné les résultats espérés, je me suis rabattu sur l'eau. Des litres de liquide, des torrents de flottes à enjamber ou à traverser. Avec ce piège, les pertes allaient être terribles d'autant qu'avant chaque passage , j’appâtais secrètement les piranhas avec une poudre de mon invention ...

 

Mais rien n'y fit . Ces gars tenaient du divin. Yves courrait sur l'eau d'une légèreté majestueuse ...



- les chausses trappes s'enchaînaient et rien. Les "expandables" version trail, sauf Charly mais nous en avons l'habitude. Dans le milieu, on l'appelle le routard. une pointe de vitesse à faire pâlir les guépards ... sur route.

 

Moi, je le rebaptiserai "le précieux". Ah de la boue !, ah des ronces !, ah une côte ! ah il fait froid !, ah il y a du vent ! on va pas mettre ses pieds dans l'eau quand même ! j'abrège, car on pourrait y passer la nuit.

 

On a bien tenté de s'en débarrasser (croche pattes, distributeur de bières gratos , macdo éphémère construit sur le parcours  pour l'occasion )  mais en vain . Même lui a résisté à toutes les tentations. Faut dire qu'avec le molosse qu'on avait aux trousses et son air que nous pourrions qualifier de ... peu engageant, fallait pas trop ralentir.



Dans tous ces groupes surentraînés, il y en a toujours un pseudo physicien, malade d'explosif, fana de la poudre à canon présentant autant de garantie mentale qu'un Charly après une bouteille de vodka maison dans la tronche. Ce cas n'a pas dérogé à la règle. Ils m'ont même filé un vrai prof de physique. Pas le péquenot de collège ou lycée facilement impressionnable, non, celui de prépa capable de te donner la composition exacte de la boue rien qu'en la goutant avec son auriculaire. Le gars déjouant le moindre piège rien qu'en humant l'air, le fin limier. Ces salops étaient bien préparés .

 

nous enchaînions les raides ascensions. nous sprintions dans les raidillons, nous slalomions entre les arbres, les feuilles traîtresses et les racines glissantes. En tête du groupe, je menais un rythme à la Vinokourov sous EPO , type fartlek pour tenter de fatiguer les organismes mais leurs visages maculés de crasse arboraient toujours fièrement des sourires démoniaques et supérieurs .



Pourtant a un moment, je pensais avoir commencé la sélection. Puisque je ne pouvais les épuiser , j'allais les affamer. Frédéric, ancien gros ( faut dire les choses comme elles sont ) avec un physique qui tenait plus du chasseur à la galinette cendrée que du trailer, voyait passer tous les matins de sa fenêtre ( en mangeant un pot de glace ben n nuts aux noix de macadamia ) , et quel que soit le temps ,Yves et son charmant sourire en plein entraînement . Voulant imiter une telle icône , Frédéric avait décidé de changer.

 

Il était donc passé au végétalisme. Le mec ne bouffait depuis que des feuilles. Sans le savoir, je l'avais amené au paradis. Il s’arrêtait à chaque taillis pour goûter des ronces. "C'est de la forestière, la meilleure" répétait il. Et c'est moi qui lui avait servi son pêcher mignon sur un plateau.
Du coup, l'individu au physique totalement métamorphosé nous a fait une sortie complète de 30/30 : 30 secondes de dégustation de feuilles, 30 secondes de sprint pour nous rattraper. Impossible à larguer.



Tant d'accompagnateurs et si peu de solutions ...J'ai donc fait marcher mon cerveau que tout le monde sait génial. J'ai regardé le groupe dans les yeux. Membre par membre pour tâcher d'identifier une faille. Il ne restait qu'une possibilité : Jimmy. Et puis j'ai lu ce qui se cachait au fin fond de son âme et ça m'a fait peur. Alain Souchon, grand poète ne disait il pas :
" Jimmy, t'es fort, mais tu pleures
Sur le cuir de ta Chrysler
Là-bas le soleil s'écroule dans la mer
Jimmy, les filles pour le cœur
Comme l'alcool et les revolvers
C'est sauter en l'air
Tomber par terre
Boum ! "

j'ai voulu éviter tout problème avec ma voiture. Le cuir est neuf , je voulais pas que ce con me pleure sur le tissu de mon insigna. Ni qu'il fasse "boum". Je l'ai laissé tranquille , faut jamais tirer sur une ambulance .



Vaincu. J'avais prédit l'enfer et ces mecs s'en sont extraits sans une égratignure. Le fleuron franco belge ...
Je les ai remercié par politesse . Je me suis bien dit que j'avais encore le temps de faire une dernière côte, mais cela n'aurait rien changé ... ils étaient trop forts.



Alors, dans le soleil couchant, je suis monté dans mon opel que Jimmy n'avait pas eu le temps de saloper, et je me suis éclipsé, fomentant déjà un autre guêpier dans lequel je pourrai les attirer.
Je les aurais un jour, je les aurais.



Tous ces faits ne sont évidemment que pure invention (quoi que ... Charly est bien une chochotte, Stan a bien une case en moins, Mickael est bien très musclé, Frédéric est bien devenu maigre, Yves est bien resté serre file, Jimmy n'a pas trop pleuré, Ben fait bien de la physique ).

Merci pour votre venue à tous les 7 !

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